Pour le compte de notre rubrique langues et cultures africaines, nous avons déniché pour vous un noble et digne fils du département du Nde chef lieu Bangangté. Il a mis sur pied une vidéo en ligne pour apprendre à compter de 0 à 10.000 en langue Medùmba et il compte aller au milliard. Puisqu'il s'agit de Mr.Brohka Chouakeu, résidant en United Kingdom, nous lui avons donné la parole. [...) Tu n’es pas et ne sera jamais le point central de la pensé de ces langues. Il n’y a que dans ta langue que tu te sentiras célébré, aimé, encouragé, chéri, respecté et honoré. Car tu es la source de vie de cette langue dont les créateur pensaient à toi et rien que à toi tout au long de sa création et son existence.
Bonjour Mr. Chouakeu! Merci de nous accorder cette interview! Vous avez mis en ligne, une vidéo pour apprendre à compter de 0 à 10.000. Nous savons tous que les chiffres ne s'arrêtent pas à 10.000, avez-vous en vue d'aller jusqu'au milliard?
Bonjour; tout le plaisir est le mien.Oui je compte bien aller au-delà de cette limite en expliquant le principe de base et ainsi permettre à toute personne qui en a besoin ou qui a le temps de compter effectivement jusqu’à l’infinie.
La vidéo en ligne qui permet de compter de 0 à 10.000, l'avez-vous faite pour initier les apprenants tout doucement?
C'est juste le plaisir de partager la connaissance à tous/toutes ceux/celles qui sont intéressé(e)s. Pour partager la connaissance car je ne suis pas un expert. Et ensuite aider ceux qui savent moins et veulent connaitre.
Pour nos lecteurs et lectrices, qui est Mr. Brohka Chouakeu?
Je m’appelle Brohka Chouakeu, je suis Medùmba et auteur du site www.BrohkaChouakeu.com à travers lequel je souhaite créer un dépositoire de la culture africaine en général et camerounaise en particulier vue que c’est celle dont je suis sensé connaitre le mieux.
Que représente pour vous la culture et la maîtrise de sa langue maternelle?
Je répondrais à cette question en 2 volets en commençant par la langue:
1) Une langue est l’identité par excellence d’un peuple et implicitement de chaque individu appartenant à celui-ci. La langue renferme l’histoire, la pensée créative, spirituelle, juridique , humaine et la vision du monde de ceux qui sont à son origine. Connaitre une langue c’est bien ; mais connaitre sa langue maternelle c’est unique. Cette connaissance est le socle de l’assurance dont a besoin un individu dans la vie ; car elle lui permet de savoir ce qu’il est, d’où il vient, de prendre conscience de son héritage culturel de sa place parmi les autre humains et enfin de savoir où il doit aller.
Donc pour moi, ma langue maternelle est ma source d’assurance, de savoir , d’orientation , de motivation et d’inspiration.
2) La culture d’un peuple est son réservoir de savoir accumulé tout au long de son existence ; c’est ce peuple dans ses multiples expressions : linguistique, culinaire, artistique , spirituelle et sociale. Elle est unique et distingue ce peuple des autres peuple en lui procurant souveraineté, indépendance, authenticité, orgueil et fierté. Elle est le bien le plus important pouvant être transmit aux futures générations qui s’en serviront comme source de savoir et d’inspiration.
Comment s'appelle votre langue maternelle, comment l'aviez-vous apprise, et que signifie votre nom?
Ma langue maternelle est le Medùmba. Elle a toujours été parlée dans notre maison ; donc je l‘ai connue en mon insu et elle m’a permis de connaitre d’autres langues. Cependant, je l’ai approfondie dans la vingtaine quand j’ai découvert ma passion pour ses chansons et j’en suis tombé amoureux.
Mon nom Brohka : Broh= Bon, Ka=Trop, signifie « Trop bon »; et
Chouakeu : Littéralement « Ma petite bouche » Chou=Bouche, A (comme dans Yame/Ame)=Mien et Keu=Petit, signifie « la voix de la raison » = C’est après l’avoir ignoré et échoué qu’on accepte ce qu’a dit la Petite Bouche.
Quelles sont vos relations par rapport à d'autres compatriotes qui ne savent pas dire Bonjour en leur langue maternelle?
En ce moment nous soufrons d’une crise identitaire aiguë et il est fréquent de rencontrer des compatriotes qui croient que nos ancêtres étaient des gaulois ou veulent que ce soit vraiment ainsi. Nombreux suivent la masse par pure simplicité d’esprit et ne se sont jamais accordé le temps d’y penser de façon profonde et d’y faire une synthèse. Cependant il y en a qui partage la même idée sur nos origines, notre situation actuelle et le chemin à suivre. Tous ensemble nous essayons d’entamer le dialogue afin de réveiller la conscience là où il y en a. C’est pour cela que j’ai lancé le site www.BrohkaChouakeu.com pour créer le dialogue et déclencher un débat sur ces idées.
Parlant justement de cette vidéo, y -t-il a vraiment une demande de vos ami(e)s à pouvoir parler et écrire leur(s) langue(s) maternelle(s)?
Oui il y en a et nous essayons de trouver un moyen approprié pour enseigner la langue sur le web afin de partager les ressources avec toutes les personnes intéressées.
Y aura-t-il plus tard des épreuves mathématiques, telles la simple arithmétique, l'algèbre, l'analyse?
Je ferai le maximum possible pour partager ce dont je connais et ce que je reçois des autres. Donc toute contribution est vivement appréciée ; je sais qu’il y a de nombreuse personnes là dehors qui connaissent un tas de chose. Je les prie de les faire savoir afin qu’elle ne se perdent complètement.
Dans la vidéo, vous vous exprimez très bien en British - English, vous avez gardé l'accent Medùmba lorsque vous comptez. Comment avez-vous réussi à maintenir l'accent Medùmba sans toutefois la dé-naturaliser?
Tout simplement parce que je pense en Medùmba qui est la base de ma pensé , conditionne ma vision du monde, mon raisonnement, mon attitude et mon comportement.
Avez-vous en vue (ou avez-vous dans votre ville une école) de créer une école de langue Medùmba?
Nous projetons faire des séminaires d’introduction de la culture camerounaise au peuple noir en particulier et à tout l’univers en général. Une école viendra avec la demande.
En rapport avec le Cameroun, avez-vous des projets concrets?
J’essaye de garder nos richesses linguistiques et folkloriques à travers mon association de Ben-Skin « Keu Lou Deu » de Makèpè à Douala. Et avec ARPEDAC nous travaillons sur le terrain pour la promotion de l’énergie renouvelable et un mode de vie sain et responsable.
Quelles sont les difficultés que vous rencontrez sur le terrain?
La difficulté principale est la tendance des nôtres à se battre pour assimiler ce qui vient d’ailleurs au détriment de ce que nous avons. Le mal le plus grave c’est l’attitude des personnes d’un certain statu social qui ne perdent jamais l’occasion de faire voir combien ils ont assimilé la culture européenne en faisant le maximum d’effort pour se distancer de la leur.
Nous avons appris que vous avez introduit le BEN-SKIN comme projet pilote de sport dans les Gymnases. Comptez-vous le faire pour d'autres rythmes africains?
Les rythmes africains en général souffrent tous du même mal à l’exception des danses Mandingues et sénégalaises qui jouissent d’une bonne notoriété. Réussir à faire consommer le Ben-Skin comme on consomme le Sabar ou le Balax est notre objectif.
Nous arrivons au terme de notre entretien, avez-vous un message à adresser à tous les jeunes africain(e)s, particulièrement à ceux/celles du Cameroun, qui ne savent pas parler leur(s) langue(s) maternelle(s)?
Je leur dirai tout simplement que le bonheur est en eux et nulle part ailleurs. Ils n’ont qu’à prendre un instant pour regarder et constater par eux-mêmes combien ils sont beaux, créatifs, uniques, riches , désirable et superlatifs. C’est bien de connaitre le français, l’anglais, l’espagnol, l’allemand et maintenant le chinois. Tu n’est pas et ne sera jamais le point central de la pensé de ces langues.
Il n’y a que dans ta langue que tu te sentiras célébré, aimé, encouragé, chéri, respecté et honoré. Car tu es la source de vie de cette langue dont les créateur pensaient à toi et rien que à toi tout au long de sa création et son existence.
Et rappelles-toi que le tien c‘est le tien. Tu ne devras pas en avoir honte. Qu’il soit désirable ou pas c’est le tien. Il appartient à toi de le faire être ce que tu désires ; mais ne le laisses pas mourir car tu as le devoir de le transmettre à la génération suivante.
Un vœu personnel pour l'Afrique!
L’Afrique a besoin de notre amour. Je souhaite que tous ses enfants lui procurent tout l’amour et la protection dont elle a besoin pour sa survie.
Un dernier mot!
Africains et africaines, aimons-nous comme les enfants d’une même terre et d’une même personne.
Veuillez tous recevoir mon amour fraternel.